Après le massacre d’Ikonongo avec l’assassinat de Pierre Anga, Sassou s’ingénie à décimer encore le peuple du Pool et ainsi vouloir se faire la peau du Pasteur Ntumi. Tout ceci se déroule dans un silence assourdissant qui frise le mépris tant au niveau national qu’international.

Il y a des causes nobles qui unissent les citoyens d’un pays et celle-là en est une. Nous ne pouvons plus dire que nous ne savions pas. Malmenés comme les Juifs le furent à un moment de l’histoire, les populations du Pool, depuis longtemps, ont toujours payé un lourd tribut à ce qui semble être des errements successifs des différents gouvernements congolais. Nos avons été victimes des exécutions sommaires au petit matin, des emprisonnements arbitraires et des bombardements des quartiers et villes. Le calvaire continue pour nous autres qualifiés de « valets locaux de l’impérialisme imaginaire » par des communistes convertis opportunément à la démocratie et non par conviction. Le summum de la cruauté est atteint quand l’un de nos dignes fils, l’ancien Président de la République Alphonse Massamba-Débat se retrouve sans sépulture car volatilisé dans la nature comme s’il n’avait jamais existé. Nos plaies ne seront jamais refermées tant que la lumière ne sera pas faite sur ce dossier. Nous avons le droit de rendre un dernier hommage digne à l’un des nôtres et de faire notre deuil devant ce qui restera encore de sa dépouille. Nous sommes de la race de ceux que l’on opprime, mais encore pour combien de temps ?

Quand le droit est bafoué, c’est l’honneur de la république qui est sali. Et rien que pour cela tous les démocrates congolais devraient dire NON, réaffirmer leur désapprobation vis-à-vis du génocide qui se passe dans le Pool. Devrions-nous être rayés de la carte du Congo, afin que Sassou réalise avec la complicité tacite des autres son dessein d’une royauté au Congo ? Ne vous méprenez pas car le Pool est encore le dernier verrou qui nous maintient dans la république.

Oui, je suis meurtri à double titre. En tant que ressortissant de ce département qui a forgé ma vision d’homme pour y avoir passé une partie de ma scolarité, et en tant que Congolais qui ne peut rester silencieux devant ce qu’il y a lieu d’appeler maintenant l’innommable. « Se taire est pire encore ; toutes les vérités tues deviennent vénéneuses ». Jusqu’à preuve du contraire au nom de l’unité nationale et du principe intangible du respect de nos frontières, le Pool fait toujours partie du Congo. Loin de nous malgré nos souffrances, l’idée de faire cavalier seul. D’aucuns nous regardent régler seul un différend créé et voulu par le Prince d’Édou qui nous voue une haine viscérale.

C’est le gouvernement de fait qui communique sans vergogne sur sa propre barbarie dans le Pool, pendant que d’autres s’affairent dans une convention de l’opposition faite de bric et de broc telle une auberge espagnole. Devant le silence de ceux des nôtres qui profitent des largesses de ce pouvoir, il y a lieu qu’ensemble avec tous les autres nous disons NON à cette barbarie. Je ne puis continuer à avoir honte d’être un ressortissant du Pool, à avoir les yeux remplis de larmes, la gorge nouée, l’estomac serré, à marcher la tête baissée, le dos courbé, car maintenant Il faut prendre le taureau par les cornes bien que l’issue puisse parfois être fatale. N’est-ce pas notre grandeur que de risquer nos vies pour nos idéaux ?

Celui qui se défend contre l’envahisseur ne peut être considéré comme un bandit. En cela le Pasteur Ntumi est un résistant qui mérite toute notre sympathie et considération. Ce dernier agit là où d’autres couchent et se couchent. Certains diront que ces pratiques sont inacceptables dans un État de droit. Mais dans une république sans foi ni loi comme le Congo-Brazzaville de Sassou, nous disons que c’est l’oppresseur qui détermine l’arme de l’opprimé. A tous ceux qui disent travailler en silence, je réponds que je préfère « la folie des passions à la sagesse de l’indifférence ».

J’ai un rêve. Celui où tous les Congolais, enfants, jeunes, adultes et vieux se révolteront du sort actuel qui est le leur. Ne restons pas dociles, car « un peuple de moutons engendre un gouvernement de loups ». Après le Pool ce sera le tour de quel autre département ? Un climat d’insécurité semble déjà gagner les populations paisibles de la ville de Pointe-Noire avec des braquages à répétition. C’est la guerre civile qui pointe à l’horizon.

Il faut qu’on se le dise. Tant qu’il n’y aura pas la paix dans le Pool c’est le Congo tout entier qui ne sera jamais en paix. Le Pool ne pourra continuer éternellement à pleurer ses morts et vivre dans des conditions indignes. Le Pool vaut bien une « trêve des confiseurs » afin de mieux vivre en paix. Nous ne fermons pas la porte au dialogue inclusif qui tôt ou tard s’impose. Plutôt tôt que tard car la situation devient intenable. Comme disait Norbert Zongo « nul n’aura d’avenir dans un pays qui n’en a pas ».

En politique comme en entreprise et dans la vie, on a tout un tas de problèmes. Les priorités du moment en termes de feuille de route sont :

  • l’arrêt immédiat des bombardements dans le Pool, afin de nous épargner davantage des pertes inutiles en vies humaines,
  • la libération immédiate de tous les prisonniers politiques, d’ailleurs il y’en a 4 millions au Congo,
  • le retour de tous les exilés politiques,
  • la tenue du dialogue inclusif entre tous les Congolais afin de discuter sans ambages du respect de l’ordre constitutionnel et de l’avenir de notre nation.

Le temps des joutes électorales viendra par la suite et le peuple souverain départagera les différents protagonistes.

« Aucune paix n’est possible tant qu’il y a en vous des luttes, des tensions, de la peur. Comment peut-il y avoir la paix sur terre si c’est la guerre en vous ? ». Sai Maa.

—-

Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA