Dans la période allant de 2005 à 2007, j’étais membre d’une commission du Comité préparatoire de la concertation citoyenne du Pool, comité dirigé par Monseigneur Louis Portella Mbuyu, lequel était secondé par Monseigneur Anatole Milandou. Nous siégions et tenions nos réunions à cette époque-là, à la Cathédrale Sacré cœur de Brazzaville.

Parmi nous il y avait d’autres personnalités originaires du Pool à l’instar de Nkombo Matsiona, l’ancien ministre Hombessa, Kakoula Kadi, Bonaventure Mbaya, Madame Hombe… Le Haut-commandement militaire y était représenté par le Général Nkonta Mokono et il y avait également des représentants de la Présidence de la République lors de nos réunions. A ce titre, j’avais rencontré beaucoup de cadres politiques tout comme militaires du pays ; fait partie de certaines missions de paix dans le Pool, au point de m’entretenir personnellement, à la Louila, avec le Révérend Pasteur Ntumi. Il arrivait parfois à cette époque-là, pendant que j’étais dans ma demeure à Brazzaville, que le Pasteur Ntumi me donne un coup de fil depuis la Louila, pour discuter des questions de paix et, surtout, celles liées à son retour dans la capitale politique.

De toutes les leçons que j’avais apprises lors de mes différents échanges et rapports avec les gestionnaires de la guerre du Pool, la plus grande m’avait été donnée par feu le Général Blaise Adoua, paix à son âme. Ce dernier m’avait confié ceci : « Milex mon petit, la guerre de 1997 devrait normalement débuter à Owando où avaient été enregistrées les premières escarmouches entre les cobras de Denis Sassou-N’guesso et les forces de l’ordre. Mais, le Président Sassou nous avait dit, ba bundaka bitumba na kati ya ndako te (on ne se bat jamais dans sa propre maison). S’il nous faut faire la guerre, ne la faisons pas dans nos villages au risque de les détruire. Allons la faire à Brazzaville. Il n’y a que dans cette capitale que nous avions tous contribué à construire que nous devrions faire la guerre. Mais pas dans nos villages ».

Ce raisonnement, il paraît de Denis Sassou-N’guesso, peut choquer les personnes faibles d’esprit, c’est malheureusement celui de beaucoup d’autres cadres politiques lorsqu’il s’agit de protéger leurs villages et leurs populations. C’est aussi peut-être celui des cadres originaires du Nord, qui ont contribué à préparer l’attaque du 4 avril 2016 avec les hommes du Pasteur Ntumi, puisque, jusqu’à ce jour, ils n’ont jamais déclenché une guerre quelconque dans leurs départements d’origine pour déstabiliser le pouvoir en place et lui contraindre à dialoguer.

Je tiens à préciser à titre d’exemple, que les tékés constituent actuellement le gros des prisonniers politiques qui écument l’univers carcéral de Brazzaville. Pourtant, le département des Plateaux n’est pas entré en guerre contre le régime en place pour réclamer la libération de ses fils prisonniers. Les tékés ont peut-être compris la leçon de Sassou et attendent l’opportunité de faire un jour la guerre dans Brazzaville.

Dans la mesure où les autres cadres politiques du pays, sont passés maîtres dans la protection de leurs départements d’origine, il n’est pas sage que le département du Pool serve à nouveau de base arrière d’un conflit politico-militaire au Congo.

Jean Marie Michel Mokoko a bien été incarcéré, la guerre tribale, tant promise, entre les Makoua et les Mbochis, n’a pas eu lieu. Le Pool ne peut donc être un département cobaye dont on se sert pour faire toutes sortes de revendications. De toute de façon, on sait comment ça se passe dans ce pays. Quand on veut prendre le pouvoir, on sacrifie les fils du Pool, et quand arrive le temps du partage du pouvoir, ces derniers sont regardés avec beaucoup de mépris et de dédain.

La guerre dans le Pool, nous l’avons déjà fait de 1998 à 2002, elle ne nous a rien apporté en termes de changement de régime. Celle qui a cours actuellement dans le département, à moins qu’elle ne soit délocalisée, est également vouée à l’échec, étant entendu que le pouvoir se gagne à Brazzaville. Maintenant, s’il y a des gens qui encouragent la guerre, qui pensent que pour infléchir la position du pouvoir et le contraindre à dialoguer, il faut des affrontements armés.

Il n’y a pas de problème. Mais dans ce cas, pour reprendre les propos de Denis Sassou-N’guesso, faisons la guerre à Brazzaville, détruisons la capitale que nous avons tous contribué à construire, entretuons-nous, et laissons nos enfants faire le bilan des conséquences et tirer les leçons de cette guerre que nous ferons en pleine ville.

Enfin, une fois de plus la guerre est inutile dans le Pool, préoccupons-nous des jeunes de la garde présidentielle et républicaine, des miliciens ainsi que des populations, qui perdent leurs vies inutilement dans ce département où des villages sont quasiment détruits et des habitations brûlées. N’y a-t-il pas moyen de mettre un terme à tout cela, d’autant que le Chef de l’Etat, dans un de ses derniers discours de fin d’année, avait dit : « Le sang et les larmes des autres ça suffit ».

Mais ce qui coule actuellement dans le Pool c’est quoi ? N’est-ce pas le sang et les larmes des autres ? Que dit le préambule de la dernière constitution, présentée comme le fruit d’une approbation massive des populations ? N’est-ce pas que le Congo : « affirme son attachement aux vertus du dialogue comme moyen de règlement pacifique des différends dans le cadre d’une République apaisée ». Le département du Pool fait-il exception à la règle ?

Guy Milex Mbondzi