Le chef d’Al-Qaïda a été tué dimanche au Pakistan après des années de traque des services secrets américains. Un succès qui a été possible grâce à la localisation d’un des principaux hommes de confiance de Ben Laden.
Sa capacité à échapper aux recherches de la plus puissante armée du monde avait fini par attirer les sarcasmes sur Washington. Ou à fortifier la fameuse thèse du complot, dans laquelle Ben Laden devait sa liberté… à la protection américaine.
Trêve d’hypothèses farfelues : l’homme le plus recherché du monde, le terroriste le plus haï de la planète, la figure la plus emblématique de la nébuleuse Al-Qaïda, Oussama ben laden a été tué par un commando américain mercredi, dans un immeuble d’Abbottabad, à une cinquantaine kilomètres seulement de la capitale pakistanaise Islamabad. Brarack Obama l’a affirmé, des sources sécuritaires pakistanaises l’ont confirmé, de même que des djihadistes yémenites d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa).
Ce succès tardif de l’armée américaine – presque dix ans après le 11 septembre 2001 – a provoqué une vague de joie dans deux pays particulièrement touchés par les attentats d’Al-Qaïda : les États-Unis, mais aussi le Kenya. Il est dû à des années de traque dont les détails, qui forment un véritable puzzle, commencent à peine à être dévoilés.
Messagers personnels
« Dès le moment où nous avons identifié Oussama Ben Laden comme une menace, la CIA a rassemblé des éléments sur les personnes de son cercle proche, dont ses messagers personnels », raconte un haut responsable de l’administration Obama sous couvert d’anonymat.
Or l’un de ces « messagers » intéressait particulièrement les services américains. Des membres d’Al-Qaïda capturés avaient donné son « nom de guerre ». Ils l’avaient présenté comme un protégé de Khaled Cheikh Mohmmed, le « cerveau » des attentats du 11 septembre, et un assistant de confiance d’Abou Faraj Al-Libbi, le numéro trois d’Al-Qaïda capturé en 2005.
« Ils ont aussi présenté cet homme comme l’un des seuls messagers en qui Ben Laden avait confiance et ont indiqué qu’il se pouvait qu’il vive avec lui et le protège. Mais pendant des années, nous n’avons pas pu l’identifier par son vrai nom ni savoir où il se trouvait », confie le haut responsable américain.
Nombreux indices
Mais en 2007, l’identité de l’homme de confiance de Ben Laden est découverte. Il faudra encore trois années aux Américains pour le localiser au Pakistan, où il habite avec son frère. « Mais nous n’arrivions toujours pas à savoir exactement où ils vivaient. » Les précautions que prennent les deux hommes pour ne pas se faire remarquer les rendent de plus en plus suspects. « Le fait qu’ils soient si prudents nous a confortés dans le sentiment que nous étions sur le bon chemin », confie le responsable américain.
En août 2010, l’habitation des deux frères est enfin localisée : il s’agit d’un « complexe à Abbottabad », dans un quartier peuplé de militaires à la retraite. Barack Obama est informé. « Quand nous avons vu le complexe dans lequel les deux frères vivaient, nous avons eu un choc », confie le haut responsable américain. Le complexe occupe un vaste terrain. Il est « huit fois plus grand que les autres maisons du quartier ».
Chaque détail de la résidence est expertisé. Tous les moyens sont vraisemblablement utilisés : satellites, drones, renseignement humain… Les mesures de sécurité qui entourent la résidence sont « extraordinaires », selon la source américaine. Les bâtiments sont protégés par des murs s’élevant jusqu’à 5,5 mètres avec des barbelés, et l’on y accède qu’à travers « deux portails sécurisés ».
Forte probabilité
Derniers détails révélateurs : la maison n’a pas d’internet ni de téléphone, les habitants brûlent leurs ordures alors que leurs voisins bénéficient d’un service de ramassage, l’immeuble d’habitation a « peu de fenêtres sur la façade extérieure » et les toits sont même bordés de murs de deux mètres pour protéger les occupants des regards indiscrets…
Les deux frères n’ont en outre aucune ressource apparente qui leur aurait permis de s’offrir une propriété évaluée à un million de dollars. Enfin, ils vivent avec leurs familles et avec une troisième famille qui ressemble fort à celle de Ben Laden… Pour les Américains, il y a une « forte probabilité » que le chef d’Al-Qaïda soit caché à d’Abbottabad.
Vendredi, à 8 h 20 (12 h 20 GMT), Barack Obama autorise l’opération. Elle va durer quarante minutes au sol et se solder par un succès. Ben Laden, un de ses fils et les deux frères, ses messagers, sont tués ainsi qu’une femme utilisée comme « bouclier humain par un combattant ». Une autre femme est blessée. Le corps de Ben Laden est emmené. Ici s’arrête, pour le moment, le récit du haut responsable américain.
UNE OPÉRATION « EN PLEIN CŒUR DU PAKISTAN »
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La chaîne ABC a diffusé lundi 2 mai les premières images de la villa d’Oussama Ben Laden au Pakistan, dévastée et maculée de sang après le raid des forces spéciales américaines au cours duquel le chef d’Al-Qaida a été tué. Les images diffusées montrent des traces de sang sur le sol d’une chambre de la bâtisse cossue et ultrasécurisée située à Abbottabad, une ville-garnison au nord-ouest d’Islamabad. On y voit des meubles renversés et plusieurs ordinateurs dont les disques durs ont été arrachés.
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