«Tosa ô liya mpé ô bika» est une stratégie qui consiste à infliger les pires des humiliations aux gens du nord qui refusent de pactiser avec ce pouvoir.» Marion Michel Madzimba Ehouango
Plus les années passent plus le pouvoir de Denis Sassou Nguesso s’enfonce dans la dérision croyant asseoir sa politique par une manipulation des concepts, rigueur et élégance en y ajoutant une pointe de culpabilisation. La misère du peuple est devenue son terrain propice pour ameuter la foule appauvrie pour venir soutenir une démarche dont à la sortie seuls quelques privilégiés en sont les bénéficiaires.
Il nous paraît utile de faire attention lorsque l’on critique le pouvoir de Denis Sassou Nguesso avec un argumentaire ethnique ou tribal, cela renforce sa position de dominateur malsain au sein des ressortissants du Nord pays. Nous l’avons déjà certes écrit, dit et redit, mais il en vaut la peine de le redire comme l’a si bien fait le Doyen Marion Michel Madzimba Ehouango à qui j’emprunte une grande partie de ces idées.
Pour ceux qui l’ignorent encore la politique du «tosa ô liya mpé ô bika» n’est autre qu’une soumission sournoise imposée aux autres par les membres du système, en particulier aux ressortissants du nord en utilisant les stratagèmes de la peur, l’intimidation et le dénuement. « Tosa ô liya mpé o bika » ...est une stratégie qui consiste à infliger les pires des humiliations aux gens du nord qui refusent de pactiser avec ce pouvoir. Ainsi les cadres placés dans ces conditions se retrouvent peu à peu marginalisés de leurs groupes (parfois des familles se disloquent !) Tenus pour responsables de ce que les membres de la famille ne profitent pas de la « prospérité ethnique ». Marion Michel Madzimba Ehouango.
Il est important d’intégrer que de toutes les causes qui entravent le développement de notre pays, l’instrumentalisation politique de l’ethnie en est la principale, car c’est d’elle que découle, pour l’essentiel, les antivaleurs et les dérives sur la dépravation qui le minent aujourd’hui (favoritisme, corruption, laxisme, violence politique, obscénité, dépravation des mœurs, etc.)
Aussi, lorsque nous tentions d’expliquer les dérives du système Sassou en incriminant tous les nordistes, nous donnons nous même le bâton pour qu’on nous frappe. C’est faire preuve d’une cécité intellectuelle grave. C’est une manière de soutenir ce pouvoir moribond sans le savoir. Il est connu de beaucoup que tous les compatriotes du Nord ne sont pas tous au lait et au miel. Beaucoup sont plus victimes que les ressortissants du Sud qui se croient plus victimes. Il n’y a pas pires frustrations et humiliations que celles qu’on subit en silence, réduit à un état d’esclavage.
La frustration est une situation dans laquelle quelqu’un peut se sentir en colère et se fâcher parce qu’il ou elle ne peut pas contrôler ou changer une situation ou atteindre un objectif souhaité. Les actes d’être empêchés de réaliser ce que vous essayez d’atteindre est appelée frustration. Beaucoup de gens aujourd’hui sont frustrés à cause d’une raison ou une autre, même un grand nombre ont donné place à la frustration alors que certains sont morts à la suite de la menace laide. Le pouvoir l’utilise en se servant des maux qui minent notre société: chômage, précarité, pauvreté et santé. Quand les gens n’ont pas d’emploi et les moyens de subsistance, ils sont frustrés et de même lorsqu’ils sont malades ou incapables de soigner un parent se retrouvant dans une situation sanitaire critique, ils sont frustrés. Le pouvoir vient à la rescousse à ce moment précis en vous culpabilisant de faire un mauvais choix. Et le bon ce serait « tosa ô liya mpé ô bîka »
Les taudis côtoyant les détritus les plus insolites sont autant à Oyo, Edou qu’à Mossendjo ou à Komono. Ce serait une erreur de penser que tous les ressortissants d’Oyo vivent dans une certaine opulence. Ce privilège, le clan SASSOU ne la réserve qu’à ceux qui respectent le principe de « Tosa ô liya ». Autrement, ils vivent dans le délestage, le dénuement à quelques kilomètres des châteaux et des villas luxueux construits parfois par des gamins de moins de 19 ans éclairés par des groupes et projecteurs capables d’alimenter un quartier de Brazzaville. La maman qui éclaire son petit taudis à la bougie et lampe tempête est parfois obligée de subir les bruits sonores des soirées festives et intempestives organisées tout le week-end par ces bénéficiaires du « tosa ô liya ». Devenue par extension « tosa ô liya mpé ô bîka » traduction littérale « Obéis, tu mangeras et vivras »
Il est donc indécent que nous, les gens du sud, comme on aime bien se distinguer s’érigeant en donneur de leçons de bonne conduite, de moralité, de bonne gestion. Nous ne sommes pas les mieux placés. Les bénéficiaires de cette dérive du système « tosa ô liya » sont également dans nos familles. Toutes hontes bues, ce sont les sudistes qui remplissent les soirées organisées par le clan Sassou. C’est encore nous les sudistes qui remplissons les salons d’attentes des bureaux de ces nantis du « Tosa ô liya » pour percevoir les enveloppes de la traîtrise et de l’humiliation.
Dernièrement, un ancien ministre qui se dit opposant le jour s’est retrouvé dans le cabinet de Jean-Dominique Okemba (JDO), la queue entre les jambes sollicitant un financement pour évacuer un membre de sa famille malade. Comme pour accentuer son humiliation JDO demande à son directeur de cabinet (DIRCAB) d’accéder à la demande de notre ancien ministre. Le DIRCAB enfonce le clou en disant au ministre qu’il n’a pas assez d’argent au bureau, il voudrait donc qu’il l’accompagne chez lui. Mais curieusement sur le chemin, la voiture du DIRCAB s’arrête devant le restaurant juste à côté de l’hôtel de ville de Brazzaville. En s’installant et devant des dizaines de clients attablés, le DIRCAB sort une grosse enveloppe et le remet en souriant à notre ministre ridiculisé et immensément gêné devant les multiples regards pointés sur lui.
Pire encore, lors du dernier passage de Denis Sassou Nguesso à Paris, la politique du « tosa ô liya » a sévi en plein fouet dans la communauté congolaise de Paris en majorité sudiste. Beaucoup ont sortis leurs habits des fêtes pour renforcer le contingent venus de Brazzaville à l’aéroport pour applaudir Denis Sassou Nguesso et son épouse. Même un ancien ministre de Pascal LISSOUBA (pas des moindres, un ministre d’Etat) croyant passer inaperçu a sollicité une audience le Mercredi 10 avril auprès de M. SASSOU. Pourtant il a pris part avec beaucoup d’autres congolais à la manifestation du 8 Avril.
La morale de cette situation est qu’il est imprudent de juger une politique tant qu’on n’a pas disséqué ses subtilités et surtout son mode d’agissement. Faire des raccourcis caricaturaux condamnant une partie de la population souffrante tout autant que l’autre est la pire des schémas de combat à adopter. Un ami m’a confié (Lionel SANZ) « Tant que l’opposition sera incapable de monter des partis d’idées et de convictions autour de programmes à brève, moyenne et longue échéance, on continuera avec le diktat du parti unique. Pour ça encore faudrait-il que les politicards se montrent beaucoup moins nombrilistes. »
JC BERI, Cette adresse e-mail est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir.