Congo Brazzaville : l’étrange destin du barrage hydroélectrique d’Imboulou

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Par:  : Christ Exauce MARSALA  

Sept ans seulement après sa mise en service, le barrage hydroélectrique d’Imboulou ayant coûté 370 millions de dollars a arrêté momentanément son fonctionnement, le 10 décembre dernier, paralysant ainsi une partie du Congo septentrionale, suite à une surtension atmosphérique de la ligne Très Haute Tension (T.H.T.) de Ngo.

Outre le barrage du Djoué construit en 1951 et mis hors d’usage par l’ensablement, le Congo dispose présentement de trois barrages hydroélectriques, à savoir le barrage hydro-électrique de Moukoukoulou, construit en 1978, le barrage hydroélectrique d’Imboulou mis en service en 2011 et le barrage de Liouesso dans le département de la Sangha inauguré en 2017 puis une Centrale à gaz de Djeno construit et mis en service respectivement en décembre 2002 et en décembre 2008 , soit que 25 pour cent des besoins énergétiques du pays. Bien qu’environ 40 mégawatts supplémentaires soient quotidiennement importés du barrage hydro-électrique d’Inga, situé en République Démocratique du Congo, le pays souffre encore d’un déficit énergétique énorme ; c’est pourquoi toutes ces unités de production ou presque passent aux yeux des populations pour des monuments qu’on peut admirer, mais sans pour autant combler leur attente.

Avec une capacité de production de 120 MW, le barrage hydroélectrique d’Imboulou est actuellement sous perfusion. Selon les techniciens, les pluies abondantes de ces derniers temps ont provoqué une surtension atmosphérique sur la ligne qui relie le barrage hydroélectrique d’Imboulou, dans le département des Plateaux au transformateur Très Haute Tension (T.H.T.). Suite à cette avarie, ce barrage a subi des dégâts plus importants qui ont contraint les techniciens d’arrêter complètement les groupes installés pour produire de l’électricité, d’autant plus que le palier turbine 1 a été noyé endommageant des cellules 10 KVA et les tableaux de bord du barrage d’Imboulou.

En attendant la remise en l’état du barrage d’Imboulou, les villages du Pole nord qui y sont connectés resteront sans électricité, aussi longtemps que la panne ne sera réparée. De l’avis des techniciens, ces surtensions sur les lignes sont fréquentes, surtout en saison de pluie. Mais, il ne faut pas se voiler la face, car ce barrage, sept ans après son inauguration, n’a jamais fait l’objet d’une révision. Or, dans le cahier des charges, il était prévu que, cinq ans après le fonctionnement sans discontinuer, le barrage devait subir un contrôle technique. Malheureusement, celui-ci n’a jamais fait l’objet d’une quelconque maintenance.

 Des sources bien indiquées affirment que le barrage de Moukoukoulou, dans le département de la Bouénza, après avoir été totalement réhabilité dans les années 2003, n’est pas aussi totalement au point faute de révision. Présentement sa capacité de 75 MW suffit juste pour satisfaire les besoins en électricité de ce département et de celui de la Lekoumou son voisin le plus proche. A Côte Matève, banlieue sud de Pointe-Noire, capitale économique du Congo (sud), les torchères de cette Centrale électrique à gaz brûlent 24 heures sur 24. Pourtant malgré les 350 mégawatts par an, une partie des habitants de la zone n’a pas de lumière.

Comme on peut le constater aisément, l’arrêt momentané du barrage hydroélectrique d’Imboulou vient encore noircir le tableau sombre de fourniture d’électricité au Congo qui connait depuis le mois d’octobre dernier des délestages chroniques, avec un record jamais connu, pour des raisons soi-disant de maintenance de deux turbines de la Centrale à gaz de Pointe-Noire . A l’instar des villes de Brazzaville et de Pointe-Noire, frappées par le plan de délestage de deux mois pour éviter le blackout, les grandes villes du nord emboîteront également le pas et il n’est pas exclu que, dans les villes connectées au barrage hydroélectrique d’imboulou, à l’instar d’Oyo, les ménages, les services, les entreprises manquent de l’électricité des journées et des semaines entières. Ce qui, de loin ou de près, sera fatal pour les PME et PMI qui risqueront de voir baissé leur chiffre d’affaire.

Le barrage hydroélectrique d’Imboulou, construit sur le cours inférieur la rivière Léfini à 14 km de sa jonction avec le fleuve Congo à la charnière des départements du Pool et des Plateaux, a été inauguré, le 7 mai 2011, par le président Denis Sassou N’Guesso. Les travaux de construction ont été confiés à la société chinoise China Machinery Engineering Corporation (CMEC). D’un coût global de 370 millions de dollars (site internet JA du 6 janvier 2012), ce barrage devrait doubler la production électrique nationale, sortir de la nuit une partie du pays et rendre possibles plusieurs projets de transformation de bois.

De nombreux observateurs congolais se demandent si cette raison évoquée par les techniciens, au sujet de barrage en déliquescence, était belle et bien fondée et pourquoi, s’interrogent-ils, c’est seulement cette année que cet ouvrage est frappé de plein fouet par ces soit disant pluies diluviennes, alors que dans les années passées, le Congo a connu une pluviométrie plus abondante qu’en 2018 ? Certains témoignages recueillis sur place et les réseaux sociaux parlent même d’un barrage complètement inondé, mais un argument battu en brèche par les techniciens qui ont reconnu, certes, qu’il ya eu de l’eau dans les turbines, mais une eau qui sera évacuée grâce à des motopompes.  » « Une opération qui est aussi facile comme bonjour », ont-ils rassuré à la presse.

L’on se souviendra que, le projet de construction du barrage d’Imboulou avait suscité de vives réactions de la part des congolais. La question que les uns et les autres se posaient, à l’époque, c’est celle de savoir si le site d’Imboulou sur la Léfini était-il adapté à ce type d’infrastructures ? N’y avait-il pas une autre meilleure possibilité ? car, selon certains spécialistes, cette rivière aurait un régime irrégulier avec des étiages sévères en période de saison sèche. Alors faudrait-il donner raison  » au site internet congopage » qui parlait, le 27 juillet 2010, de « bombe à retardement » au sujet du barrage hydroélectrique d’Imboulou ? Ce site d’information, avait parlé de travail de néophyte, car selon ses enquêtes, l’entreprise chinoise chargée de construire le barrage d’Imbouilou sur la Léfini n’avait jamais construit de barrage de sa vie. Imboulou était donc son coup d’essai, selon l’article incriminatoire.

Pas plus que, le 14 décembre dernier, le gouvernement congolais, au cours de la séance des questions orales au gouvernement avec débat à l’Assemblée Nationale, par le truchement de son ministre de transport et de l’aviation civile, Fidèle Dimou, a parlé de la modernisation et de l’électrification de la ligne du chemin de fer de la Comilog (Campagnie Minière de l’Ogoué) reliant le ville de Dolisie, au sud de Brazzaville à Mbinda sur une distance de 285km, par le biais du barrage hydroélectrique de Sounda, dans le kouilou, un vieux rêve en attente de réalisation.

 Evalué à l’époque à 925 millions de dollars, qui visait, selon les estimations, à long terme une production de 1 000 mégawatts. Les résultats des études de faisabilité du barrage hydroélectrique de Sounda, situé dans le département du Kouilou, à 120 km de Pointe Noire, ont été présentés au public le 4 novembre 2017, par la Société financière internationale (SFI). Certainement, c’est pour faire face à la situation catastrophique du barrage d’Imboulou que l’exécutif congolais pense exhumer ce vieux rêve datant de 1961 et dont le lancement des travaux avait été donné, le 08 juin 1996 par le président Pascal Lissouba.

Christ Exauce Marsala