Par Verlin RICHARD
Dans ce monde interconnecté où la mondialisation a vu des pays prendre leurs destins en main, notre pays le Congo est en crise. Une crise qui oblige l’Etat de retrouver sa place dans le développement du pays.
L’antagonisme supposé entre l’Etat et le marché né avec les débuts de la pensée économique au XVIIIe siècle, est un vieux débat.
Mais, ce débat est toujours d’actualité et depuis l’indépendance de notre pays, le Congo a une histoire qui nous donne aujourd’hui d’importants éléments de réflexion.
Notre pays, le Congo, a connu l’époque de l’économie planifiée et celle-ci s’est effondrée à partir des années 90 emportée par la démocratie naissante où les thèses libérales de l’économie se sont imposées à nous sans que nous ayons au préalable élaboré les outils de bonne gouvernance dans la qualité et la capacité de nos gouvernements à obtenir les résultats qui améliorent la situation de la population.
Nous assistons au contraire, à la croissance des inégalités, à la persistance de la pauvreté.
Notre pays, le Congo a failli malgré la réduction de sa dette par le FMI en 2010 et cette faillite n’est pas imputable au coût social des programmes d’ajustement structurel que le FMI impose à nos pays du sud mais par la non mise en œuvre des réformes structurelles qui auraient renforcé la bonne gouvernance.
En 1997, au moment où le Congo sombrait dans la guerre ayant conduit à l’arrêt d’un processus démocratique qui ne demandait qu’à parfaire son apprentissage, la Banque mondiale, dans un rapport, réhabilitait le rôle de l’Etat dans le développement économique, suite aux succès de l’interventionnisme public dans l’économie de pays asiatiques.
Aujourd’hui, la question n’est plus à rechercher les solutions pour sortir le Congo de la crise actuelle car celles-ci existent.
La question première pour le Congo est une question de légitimité politique qui confère à un gouvernement la capacité d’améliorer avec force et efficacité son action pour appuyer les dynamiques permettant de réhabiliter le rôle de l’Etat dans le développement économique du pays.
Dans cette année 2019, et au moment où le gouvernement actuel recherche les solutions aux problèmes actuels et avec l’engagement pris dans le PND 2018-2022 de faire de la bonne gouvernance une Priorité des priorités des réformes structurelles, cet objectif n’est atteignable que si notre pays fait de l’Etat, l’élément clé de la GOUVERNANCE.
La bonne gouvernance est une affaire d’Etat et ne pas le comprendre c’est porté atteinte à la sureté de l’Etat.
La bonne gouvernance est une porte, une fois ouverte, elle permet le développement économique et cette porte à 2 clés :
1- LA LEGITIMITE DE L’ETAT :
Sans cette légitimité, il est impossible à un Etat de se prévaloir de ses prérogatives vis-à-vis de ces citoyens qui ne pourront adhérer librement et avec responsabilité au projet national qui leur sera présenté. Les échecs des projets initiés depuis 1997 au Congo viennent confirmer ici l’urgence pour l’Etat congolais de retrouver toute sa légitimité. Urgence, d’abord pour nos gouvernants actuels, mais également celle de la société civile.
Le dialogue public-privé doit être restauré. Restaurer le dialogue public-privé au Congo c’est faire que l’Etat ayant légiféré contre la corruption et l’impunité puisse mettre en œuvre les lois votées. C’’est ainsi qu’un Etat retrouve sa légitimité et que la population saluera son action.
Il s’agit pour l’Etat congolais d’accroitre la transparence dans les affaires de corruption. Le dialogue public-privé est aussi un outil de développement économique.
Au Sénégal par exemple, des associations de pêcheurs artisanaux, grâce à leur expérience internationale, ont provoqué des débats avec des parlementaires sur l’avenir de leur activité. C’est cela un Etat, qui appui les initiatives de développement économique et, de tels appuis touchent divers secteurs de la société, par exemple, en Colombie, grâce à l’action de groupes de la société civile, la Constitution de 1990 reconnaît et protège désormais la diversité culturelle et ethnique.
Et, dans un pays comme le Congo où les questions tribales sont exacerbées, une telle action serait une reconnaissance officielle de la diversité culturelle du pays, de notre ethnicité sans que celle -ci entrave notre vivre ensemble.
Le défi pour l’Etat congolais est un défi civilisationnel pour reconnaître tout congolais à travers sa qualité de « citoyen » et non plus seulement à travers son nom patronymique. L’aggiornamento de l’Etat congolais est de donner à tout congolais une « CIVILITE ». Le Congo existe, le citoyen congolais est à naitre. Ce citoyen, une fois, né, l’Etat doit favoriser, la connaissance de l’Etat par les citoyens, par exemple grâce à une formation dans les collèges et les lycées, notamment pour comprendre que l’Etat n’est pas extérieur à la société, mais qu’il en est le produit.
2- La Subsidiarité :
Le principe de subsidiarité postule que c’est au plus près des citoyens que la décision publique doit être prise et que c’est au niveau local que doivent être traitées les questions de portée locale, au niveau régional les problèmes d’ampleur régionale, etc.
Pour l’Etat congolais et sous la forme actuelle de son système de gouvernance, la subsidiarité ici serait de donner la priorité aux obligations de résultat par rapport aux obligations de moyens permettant de trouver, non pas des solutions idéales, mais des solutions acceptables par tous.
Chaque ministre et chaque haut responsable d’entreprises publiques devraient engager leurs responsabilités de gestion en l’absence de résultats. Ce principe de subsidiarité permet aussi d’assurer une plus grande transparence dans l’allocation des fonds collectés et distribués par les autorités publiques, à tous les niveaux. C’est ici que l’Etat congolais doit véritablement faire de la responsabilité des acteurs publics surtout, une valeur cardinale de l’action publique. Et, à chaque fois que cette responsabilité ignore l’intérêt collectif ,qu’elle en soit sanctionnée.
Renforcer l’Etat de droit au Congo, c’est avoir un Etat légitime avec des principes de subsidiarité afin que
– Notre Etat puisse jouer véritablement son rôle de régulateur notamment sur des mouvements de capitaux non pas seulement en votant des lois pour réguler les transferts de capitaux, lutter contre l’argent sale, les paradis fiscaux et les circuits de blanchiment mais, en mettant en œuvre les lois votées.
– Notre Etat puisse réguler les biens publics. Les biens publics sont des ressources en accès libre qui peuvent être « consommées » par tous, comme l’air, l’eau, le sol, la biodiversité, le climat, l’éducation, la santé, la paix, etc. Réguler ces biens, suppose une intervention publique en favorisant par exemple, l’autocontrôle des ressources naturelles par les populations locales, par exemple nos forêts, nos minerais, notre pétrole, etc.
– Notre Etat soit véritablement un Etat stratège en jouant son rôle dans le développement économique et social sans dirigisme et despotisme, mais en assumant sa place dans le pilotage du pays. Au Congo, le concept de planification hérité de l’ère communiste doit être remplacé par l’élaboration de visions stratégiques à la fois flexibles et élaborées de façon concertée, en s’appuyant sur la culture et les savoir-faire locaux. Marier tradition et modernité est un des gages de succès de toute action de développement endogène.
Pour être au service du développement, L’Etat congolais doit être partenaire du secteur privé et non pas adversaire ni soumis à lui. Il est également nécessaire de diriger les incitations étatiques vers les petites et moyennes entreprises et de favoriser les industries légères, par exemple en développant des structures d’appui à la création d’entreprises dans le secteur agricole.
– Notre Etat soit solidaire en garantissant la santé et l’éducation du peuple.
Pour que la légitimité de l’Etat soit, Pour que le principe de subsidiarité existe, Pour que l’Etat de droit soit, Il faut que chaque citoyen congolais consente à l’impôt. Mais pour qu’un peuple consente à l’impôt, faut-il encore que l’Etat collecteur assure une fonction de redistribution. Pour l’Etat congolais, l’équité est un impératif.
Oui, l’Etat a un droit, qui est de prélever l’impôt. Il a aussi un devoir, qui est de redistribuer.