La couverture médiatique du lancement officiel des travaux de la « municipalisation accéléréede la région de la Cuvette-Ouest par les médias d’Etat est « globale ». Ce n’est pas un évènement global, c’est une couverture globale.
Personne n’a fait l’impasse. Les médias d’Etat n’ont pas choisi une couverture minimaliste. Tout est fait pour orienter l’information vers un seul objectif : Fixer l’attention des Congolais sur les actions du gouvernement savamment choisies pour les endormir.
Le contrôle des médias d’Etat et la censure
Avec la même impudeur qui leur permet, au nom de la « hiérarchie de l’information », de réduire à quelques secondes ou carrément de zapper les bouleversements socio-politiques en Afrique du Nord (Tunisie, Egypte, Lybie, Algérie, Maroc) et au Moyen Orient. Ils ont traité le déplacement de Denis Sassou Nguesso dans la Cuvette-Ouest et Cuvette Centrale sur la majeure partie de leurs journaux. Un tel non évènement a été transformé en tarte à la crème de la semaine du 14 au 19 février 2011. Cela a quelque chose de tellement pathétique. Rien d’étonnant, Sassou Nguesso et son gouvernement ont réinstauré la censure dans les médias d’Etat.
Cette gargarisation nationale ressemble par certains cotés à une jolie propagande, bluff, un mélange d’écran de fumée, de campagne d’intox et de déminage pré-électoral d’envergure. Le 21/02/2011 au journal télévisé de 20 h 00, le présentateur ignore la révolte des populations libyennes et les désertions dans l’armée qui est le pilier du pouvoir de Mouammar Kadhafi. Pendant ce temps, la Pravda de Brazzaville a mis à la une l’inauguration du Grand Hôtel de Dolisie qui a eu lieu le 14/02/2011. En prélude, un rallye (10 véhicules) a été organisé de Pointe-Noire à Dolisie par Cendrine Otonello Sassou Nguesso qui est devenue le propriétaire du Grand Hôtel de Dolisie. Mettre en exergue l’information sur une acquisition sur laquelle de lourds soupçons de délit d’initié, trafic d’influence, de corruption reflète sans aucun doute la nature vorace du clan Sassou qui s’organise pour mettre la main sur les biens et immeubles du Congo. Cette activité a un nom : Pillage organisé.
Les Congolais qui ont célébré les 50 ans d’indépendance doivent avoir du recul et se demander pourquoi la Cuvette-Ouest demeure une région enclavée ? Pourquoi cette région a été délaissée par toutes les politiques entreprises au niveau national ?
Le 14 février 2011 à Ewo, le cynisme sans limite des politiques a été couvert par les tambours et les danses folkloriques pour acclamer et saluer ceux-là même qui ont laissé plonger, par égoïsme et calcul politicien, cette région dans un marigot de pauvreté et de misère totale. Qu’à cela ne tienne, au Congo-Brazzaville, le ridicule ne tue pas. On a vu des banderoles à la gloire de Dénis Sassou Nguesso « le bâtisseur ». Ce dernier a déclaré aux médias : « Nous sommes en train d’accomplir un programme que nous avons commencé au début des années 1980 avec le plan quinquennal (…). C’est un projet lourd et nous sommes optimistes ». Durant ces 50 dernières années, vingt sept ans sont à la solde du clan SASSOU, qu’est-ce que ce clan a bâti dans la Cuvette-Ouest afin que cette région demeure à ce jour encore enclavée, sans unité de production, sans infrastructures de base ?
Ce n’est pas forcement mauvais de chercher d’engranger un succès politique en lançant une centaine de projets au détour d’une ½ journée passée à Ewo. Le plus marrant est d’entendre les Congolais s’interroger sur les effets de la « municipalisation accélérée » dans la Cuvette-Ouest. Cela va sans doute calmer l’ardeur excessive des politiques. Les 300 milliards de F CFA annoncés avec tambours et trompettes pour la réalisation de près d’une centaine de projets peuvent contribuer au développement de la Cuvette-Ouest à condition que tous les crédits soient débloqués et tous les projets prévus se réalisent totalement.
Le couvercle finira par se fondre
Mais l’optimisme des béni oui-oui du clan au pouvoir risque de paraître comme un désenchantement car en toute évidence, si on en juge les érosions, les inondations, le mauvais état des routes et l’assainissement de Pointe-Noire, Dolisie et Brazzaville qui ont bénéficié de la municipalisation accélérée. Certains projets annoncés ne sont qu’un leurre et la Cuvette-Ouest va rallonger le cimetière des éléphants blancs avec ses corollaires :
> Lenteur inextricable dans la réalisation des projets,> Travaux payés mais non réalisés,> L’insalubrité des marchés et de toutes les villes du pays,> Immondices dans les villes, assainissement déplorable surtout pour Brazzaville qui a bénéficié de 3 années de municipalisation accélérée,> Aucune infrastructure économique, sociale, sanitaire, et académique,> Pas d’électricité, pas d’eau potable, et l’état des routes pose problème,> Spoliation et détournement du domaine foncier par le clan au pouvoir,
> Pas de création d’emplois durables et pérennes.
Les maladies hydriques dues à l’absence de l’eau potable persistent. C’est le cas du poliovirus sauvage. La réhabilitation des collecteurs naturels de Brazzaville qui sont Madoukou et la Mfoa n’est pas accompagnée de solution durable. Il n’existe pas de projet de construction d’une usine de traitement des eaux usées. Pendant ce temps le peuple continue à se nourrir des poissons péchés dans le fleuve qui est présentement pollué. Toutes les formes de pollution finissent dans l’eau puis affectent la santé des Congolais. Comment pouvons-nous penser que seuls les poissons des rivières et des fleuves vont mourir et que cette pollution épargnera les Congolais ?
L’absence d’amélioration du cadre de vie des populations prouve que les carnavals organisés au lancement officiel des projets de la municipalisation accélérée sont des coquilles vides ou ne servent qu’à enrichir Sassou Nguesso et son clan.
Pour ce qui concerne la Cuvette-Ouest, sous peu, ce sont les notables de la région, cyniquement appelés « honorables ou excellences », qui vont sans gêne ériger des hôtels particuliers et des villas : signe de l’insolence et de l’embourgeoisement facile.
Le bal actuel du gouvernement paraît comme une forme de célébration cupide des lamentations des Congolais avec des promesses pieuses. Ce n’est pas être un déclinologue si on estime qu’avec les 70 milliards F CFA affectés cette année à la Cuvette-Ouest, le gouvernement peut mieux faire.
En 2012, la région du Pool a été choisie pour la célébration du bal des hypocrites. Techniquement et opérationnellement, il est totalement absurde de théoriser qu’en 9 mois, une région totalement dévastée, sinistrée pourrait être modernisée. Les animateurs du bal des hypocrites connaîtront une nouvelle aubaine. Le constat amer des autres régions ne peut que les faire reculer. Pour l’année 2011, le budget en dépense et en recette de la ville de Brazzaville a été arrêté à la somme de 20.876.62.356 F CFA par le conseil département et municipal. Ce budget pourtant à la hauteur des attentes des populations congolaises, malheureusement ne sert qu’a entretenir le train de vie démesuré du Maire et de ses acolytes de conseillers. Brazzaville est toujours aussi sale et polluée.
A force de vouloir maquiller les faits dans la vie d’une nation, la vérité finit toujours par apparaître en surface. Ceux qui pensent, comme le maire de Pointe-Noire Roland BOUITI-VIAUDO que la municipalisation accélérée contribue à l’amélioration du cadre de vie des Congolais doivent se voiler le visage. Le paysage désolant et attristant des inondations à répétitions rendant la ville à l’état de « fantôme vivant » est un spectacle qui n’honore que les incompétents qui se sont érigés en maires conseillers à vie au sommet des administrations municipales.
Le vent des bouleversements socio-politiques qui secoue actuellement l’Afrique du Nord va-t-il suivre les alizés pour atteindre le Congo-Brazzaville et mettre un terme au bal des hypocrites ? Face aux frustrations de la population de notre pays, Sassou Nguesso et son gouvernement sont enfermés dans un carcan abject en manifestant un déficit de communication et en repoussant toute approche par le mépris, l’arrogance et le dédain. Sassou Nguesso et son clan doivent se mettre à l’évidence qu’à force de s’approprier toute les richesses du pays, museler la population, la jeunesse, les médias et l’opposition, la bulle politique et sociale finira par s’éclater.
Les Congolais finiront un jour par briser la chape de plomb posée par Sassou Nguesso et son clan depuis juin 1977. Ces derniers sont devenus narcissiques et paranoïaques. La structure de ce pouvoir n’est que tribale et clanique. L’évidence révélera un jour que ce n’est qu’un château de sable.
Sassou Nguesso et son gouvernement doivent savoir que la frustration de la population est tellement grande et que toute réponse par la force aux aspirations de la population congolaise ne sera pas la solution appropriée et ne sera pas tolérée par la communauté internationale. Les armes récemment achetées en Afrique du sud et en Chine ne les protégeront pas de la révolte du peuple. Ni encore moins les intimidations, les tentatives d’empoisonnement engagées actuellement à l’endroit des militants pour la démocratie populaire ne peuvent arrêter la marche vers plus de liberté, de solidarité, d’humanisme, de progrès social, de cohésion pour une nation pacifiée et tournée vers le vrai développement axé sur le bien-être du peuple.
Chris Abela, www.dac-presse.com