Par Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA
De scandale en scandale, monsieur Denis Sassou Nguesso et son PCT (Parti congolais du travail) ont encore donné à la face du monde une image désolante du Congo-Brazzaville sous le prétexte des élections démocratiques dans une dictature. Qui l’aurait cru !
Tout le monde a fait semblant comme si ce qui s’est déroulé ces derniers jours dans notre beau pays, bien que délabré, le Congo-Brazzaville, était normal.
Monsieur Denis Sassou Nguesso, dictateur de son état, voulait une majorité écrasante pour les élections législatives et municipales, ce qui est un euphémisme vu la nature autocratique de son régime. Certains Congolais en transe, comme des moutons de panurge, se sont mis en branle pour réaliser une prophétie déjà écrite d’avance dans les officines de ce parti machiavélique qu’est le PCT à l’origine de la mort de nombreuses Congolaises et de nombreux Congolais. Ceux qui ont pu échapper à la paix des cimetières ont eu le destin brisé ou ont pris le chemin douloureux de l’exil errant çà et là comme des âmes en peine. « Le véritable exil n’est pas d’être arraché de son pays ; c’est d’y vivre et de de n’y plus rien trouver de ce qui le faisait aimer » disait Edgar Quinet. C’est ce que vivent au quotidien les cinq millions des Congolaises et des Congolais de l’intérieur qui ne savent plus à quel Saint se vouer. Décidément au Congo-Brazzaville, les voies du Seigneur sont devenues impénétrables tant les Hommes de Dieu ont quitté les églises, les temples pour les coteries.
Tout a été dit et tout a été fait à visage découvert. Les masques ne sont pas tombés, nul besoin car qui se ressemblent s’assemblent. Les trouvères étaient de retour au-devant de la scène pour amuser la galerie.
L’opulence affichée des apparatchiks congolais devant la souffrance du peuple congolais nous peine. Ils n’ont ni usine, ni entreprise, mais d’où tirent-ils cette richesse mal acquise ? Le défilé des voitures rutilantes, des avions privés, des bateaux de plaisance, l’achat des consciences, la distribution des babioles au peuple congolais transformé en mendiant par des candidats uniques dans certaines circonscriptions électorales montrent la fracture qui existe maintenant entre les Congolais d’en haut et les Congolais d’en bas. L’heure est plus que grave devant cet étalage malsain des larcins provenant du vol des deniers publics. Alors que le peuple congolais ne s’étonne plus du manque d’eau potable, d’électricité, d’hôpitaux, d’écoles, d’universités, d’infrastructures, de justice sociale, de culture démocratique, quand il se prête lui-même à cette mascarade.
Ô mon Congo, je ne puis penser de mon vivant que tu tombas si bas ! Mais que puis-je faire pour réparer pareille anomalie car tu méritais mieux que ce qui t’arrive. Les mêmes, avec les mêmes méthodes de sang et de larmes depuis ton indépendance, perpétuent l’indécence au point de faire de toi non pas un pays mais un agrégat de tribus condamné à se côtoyer, à se supporter et à se regarder en chien de faïence.
Ce n’est pas la faute de ton peuple, mais de ces dirigeants avides de pouvoir, kleptomanes qui n’osent plus condamner le vol des deniers publics, narcissiques, sans empathie pour la population qu’ils ont mis à genou pour mieux l’asservir, l’avilir. Quel désastre devant tant d’intellectuelles et d’intellectuels dont la seule survie n’est plus qu’alimentaire à défaut d’être des courtisans de premier plan. Ces derniers ont été happés par un système clientéliste dont la tribu devient le noyau de la cellule et eux les porte-voix d’un son devenu inaudible et d’une politique sans vision en dehors du divertissement.
Nous avons beau enfoui la vérité depuis maintenant plus de 61 ans, mais force est de constater que nous autres Congolaises et Congolais n’avons rien en commun qui ferait de nous un peuple à défaut de vivre sur une aire géographique délimitée par les Colonisateurs Blancs. La démonstration éclatante de cet état de fait, telle la pustule qui persiste sur notre visage vient d’être faite lors de ce dernier vacarme troublant la quiétude d’un peuple traumatisé, que certains appelleraient élections dans une dictature. Quel cynisme langagier !
Le Congo-Brazzaville voit naître sous nos yeux ébahis une dictature héréditaire à l’instar de celle de la Corée du Nord dans la tête de pont serait les Sassou et Nguesso. Allons-nous l’accepter collectivement peuple congolais ?
Les chapelles à base tribale qui avaient fleuries au lendemain de la Conférence nationale souveraine sont devenues de fonds de commerce nauséabonds récupérés par des enfants en mal de légitimité afin d’accompagner monsieur Denis Sassou Nguesso et son PCT dans cette vision monarchique de transmission du pouvoir du « Génie maléfique d’Oyo ». L’homme ne perd pas le Nord car telle est sa vision du Congo-Brazzaville de demain. C’est un coup de maître de ce personnage peu reluisant qui avait compris avant tout le monde qu’il faut diviser sur la base tribale pour mieux régner au Congo-Brazzaville. Ainsi, au Congo-Brazzaville, il est normal que tous les postes régaliens au niveau du gouvernement et tous les autres postes des responsabilités dans l’administration, dans l’armée, dans la police, dans la justice soient trustés par les ressortissants Mbochis du Nord du pays. C’EST LE CONGO-BRAZZAVILLE QUE NOUS NE VOULONS PAS.
Le racisme est un système basé sur la domination sociale d’un groupe d’individus sur un autre et l’exclusion des autres. Au Congo-Brazzaville le tribalisme Mbochi empreinte le même schéma de domination d’une tribu sur toutes les autres tribus qui composent cet État factice qu’est le Congo-Brazzaville. Nous ne voulons ni du racisme dans le monde ni de l’État Mbochi au Congo-Brazzaville.
Là où certains esprits verront du tribalisme de notre part, nous disons que les faits sont têtus, et nous pourrons en débattre sereinement. Nous assistons incrédules à l’implosion de notre pays géré comme une mafia dans laquelle chaque clan se partage le pouvoir avec au sommet de la pyramide la famille Sassou Nguesso.
J’en appelle à mes compatriotes Charles Zacharie Bowao, Marion Madzimba Ewango, Grégoire Léfouoba, Rodophe Adada, Henri Lopes, Théophile Obenga, Louis Bakabadio et tous ceux pourvus de bon sens qui participent au système de sortir de leur mutisme afin que nos voix ne puissent pas être perçues comme celles des revanchards ou des intégristes. Nous avons en partage le Congo-Brazzaville qui n’est la propriété de personne et tout homme a droit à la rédemption. Personne d’entre nous ne peut rester insensible devant tant de misère de la population congolaise. L’histoire nous jugera et sera sans concession.
Nous avons vu des meetings politiques de certains partis se disant nationaux se tenir en patois, ce qui leur confèrent ce que nous avons toujours pensé le statut d’associations locales en vue de coalition tribale pour diriger le Congo-Brazzaville.
Qui sème le vent, récolte la tempête. Quand un Président est soi-disant élu démocratiquement, et que ses partisans éructent à tout va « Ya ba colère vé », il ne faut s’étonner de voir ce que vivent aujourd’hui les Congolaises et les Congolais. Par des comportements anti-démocratiques nous avons dès le début tué la démocratie congolaise jusqu’à ne pas organiser à temps les mêmes élections qui avaient permis à ceux qui étaient au pouvoir de gouverner. La démocratie est une culture et non un slogan dont se servent à merveille dorénavant certains autocrates pour mieux s’approprier les richesses du pays. Nous avons raté les débuts, mais il n’est pas trop tard pour mieux faire.
Ce que nous avons vu de ce spectacle désolant de ces derniers jours au Congo-Brazzaville n’est que le même manège de ce que nous avons vu en 1992 avec nos premières élections démocratiques, mais cette fois-ci sous une dictature féroce. Les acteurs et les ingrédients étaient les mêmes, avec le même cauchemar à venir d’arrangement entre les petits copains et coquins de la république. Chacun a fait son petit numéro dans son fief tribal, et demain l’on viendra nous parler d’unité nationale de façade.
N’oublions pas que pendant que certains politiciens chantaient à tue-tête « Sassou a tout volé, servons-nous avec lui », certains de nos compatriotes croupissent en prison pour des délits d’opinion et de non-soumission à monsieur Denis Sassou Nguesso à l’origine du désordre national, et qui pense être la lumière du Congo-Brazzaville alors qu’il n’en est que les ténèbres.
Le seul sentiment palpable qui fait de nous aujourd’hui des Congolaises et des Congolais c’est notre aversion contre ce système mafieux mis en place au Congo-Brazzaville, et notre appartenance à ce bout de terre dont nous avons perdu la jouissance. La fraternité, ce lien social, est notre prochain chantier afin de favoriser le vivre ensemble.
La misère infligée à dessein au peuple congolais prendra fin et le Congo-Brazzaville resplendira de nouveau. L’on ne peut gouverner sciemment contre son peuple. La vie est dure au Congo-Brazzaville, et se profile des émeutes de la faim tant les prix des denrées alimentaires de base flambent. La crise multidimensionnelle congolaise fait poindre à l’horizon une crise humanitaire chaotique.
La jeunesse qui est synonyme de mobilité, de dynamisme et d’innovation, doit être acteurs du changement de l’histoire de notre pays qui a fait de la politique le seul métier pour accéder de manière frauduleuse aux richesses communes.
Que tous ceux qui ont pris part à ce tohu-bohu se posent la question de l’utilité de leurs actes.
« Si vous êtes émotionnellement attaché à votre tribu, à votre religion ou à votre parti politique jusqu’au point où la vérité et la justice deviennent des considérations secondaires, votre éducation est inutile. Votre expérience est inutile. Si vous ne pouvez pas raisonner au-delà des bas sentiments, vous êtes responsable envers l’humanité. », disait feu Docteur Chuba Williams Okadigbo, philosophe et homme politique nigérian.
Il est plus que temps de construire une vraie nation avec une vraie identité en oubliant tout ce qui nous divise pour être plus unis que jamais.