L’Afrique anglophone va décidément de l’avant. Les populations d’Afrique du Sud et du Nigéria ont compris le rôle néfaste de la corruption et du népotisme. Des manifestations importantes ont été organisées contre ces fléaux. La démission de Jacob Zuma, comme au Brésil avec Dilma Rousseff, est exigée par une très grande partie de la population. Au Nigéria, le président Buhari, récemment élu, s’est engagé fermement dans la lutte contre la corruption.
L’Afrique lusophone n’est pas en reste. Le petit Etat du Cap-Vert, après une incontestable élection présidentielle qui s’était déroulée le 20 mars dernier, en même temps que la nôtre honteuse et indigne, démontre que son administration est déterminée à s’attaquer à la criminalité financière ; contrairement à une passivité généralisée en Afrique francophone livrée à toutes les combines de l’enrichissement personnel, des deux côtés de la Méditerranée.
Oscar Tavares, le procureur général du Cap-Vert a déclaré, au début de cette semaine, que depuis septembre 2015, une enquête concernant José Veiga a été ouverte dans son pays du fait de soupçons d’un blanchiment d’argent qui utiliserait le système financier de la petite république ; dans un processus indépendant des investigations menées au Portugal sur l’homme d’affaires portugo-congolais.
Dans le détournement de fonds ou le blanchiment d’argent, il y a le tout-venant comme nous avons pu le voir avec l’affaire « Panama Papers ». Le menu fretin ou presque, Premier Ministre islandais y compris, s’y retrouvait embourbé dans le scandale.
Jamais l’on ne verra le nom d’un Denis Sassou Nguesso ni même celui de son fils, Denis Christel, pour une participation récente à ce type de montage élémentaire. Les révélations panaméennes qui touchent Kiki sont des erreurs de jeunesse qu’il ne commet plus.
Ce gang mafieux qui règne sur le Congo, désormais utilise des méthodes de dissimulation bien plus sophistiquées que celles qui ont fait l’objet de l’actuel scandale panaméen. Le fils du dictateur, et successeur au trône, avait même jeté les bases, avec son quasi-beau-frère (selon la presse portugaise) José Veiga, d’un réseau international de blanchiment d’argent qui utiliserait leurs établissements bancaires personnels, achetés ou créés, dans différents pays ; d’abord en Afrique, puis en Europe, pour parvenir à un blanchiment d’argent irréprochable. La commission rogatoire internationale lancée par la Suisse (et non par la France comme la rumeur en avait couru) sur la personne de José Veiga a interrompu la finalisation de ce projet, par l’arrestation à Lisbonne de ce dernier en ce début d’année 2016.
1ère Etape : la BGFI
Une BGFI Bank Congo, peu regardante avec à sa tête Jean-Dominique Okemba neveu du dictateur, « JDO le trésorier » qui en préside le conseil d’administration. Cette héritière de la FIBA, l’établissement bancaire créé par Elf et dissout en 2000 sous la pression de « l’affaire » du même nom, avait à sa tête Jack Sigolet, président du conseil d’administration et Pierre Houdray, Directeur général. Ce dernier, dès la dissolution de cette banque en France, à l’invitation de Sassou Nguesso et de son gendre, Omar Bongo, est allé la faire renaître sous leurs accueillantes tropiques. Cette structure est devenue la principale base d’accueil des fonds « délicats » sur le territoire congolais.
Toutefois, pour ces importants détenteurs de fonds, impossible de les injecter directement dans le système international.
2ème Etape : la BAIC
Avec la bienveillance d’un Bony Yayi toujours aux ordres d’un généreux corrupteur Denis Sassou Nguesso, la Banque Africaine pour l’Industrie et le Commerce (BAIC) a été créée à Cotonou, au Bénin, le 02/09/2013. Le flou est total sur la provenance et la répartition du capital de cette banque. Elle est présumée appartenir à Denis Christel, ou pour le moins au 2/3. Le Portugais Antonio José Da Silva Veiga en prenait la présidence. A ses côtés dans le Conseil d’administration Jean Philippe Amwame Ndong, de Philia SA bien « déclarée » du côté de Berne, et surtout l’incontournable Yaya Moussa, ancien Représentant résident du FMI au Congo, qui depuis est devenu le président de l’établissement bancaire. Ces deux derniers sont extrêmement proches du propriétaire du pétrole congolais.
Aussi, la banque portugaise Banco Carregosa a été la « banque Conseil » pour la création de la BAIC, pour son système informatique et pour la formation du personnel. Ces services ont été facturés 1,5 million d’euros (1 milliard de FCFA).
Cette étape au Bénin est importante, il s’agit en fait d’un pré-lavage.
3ème Etape : la Banco Internacional de Cabo Verde
José Veiga était devenu le principal déposant de la Banque Internationale du Cap-Vert (BICV). Il y détenait 64 millions d’euros (43 milliards de FCFA) au travers de différentes sociétés offshores qu’il contrôlait. L’une d’entre-elles avait servi à l’acquisition des biens immobiliers au profit du corrompu, toujours ministre des finances, Gilbert Ondongo et au paiement de ses vacances à Venise.
La Banco Carrogesa avait encore fourni des services consultatifs dans le projet de création de la Banque internationale africaine (BIA) au Cap-Vert qui avait été refusé par la Banque Centrale de ce pays. C’est alors qu’il s’est rabattu, au travers de Norwich Group (Canada) une coquille vide, dans une offre d’achat de la Banque Internationale du Cap-Vert pour un montant de 14 millions d’euros. Cette proposition était toujours à l’étude par la Banque Centrale du Cap-Vert avant l’arrestation de José Veiga. Elle a été finalement rejetée…
Cette avant-dernière étape était essentielle afin de peaufiner le blanchiment dans une banque lusophone, avant de rejoindre le Portugal.
4ème Etape : la Banco Carrogesa
La Banco Carregosa, est une des plus anciennes institutions financières du Portugal, elle a été créée en 1833. Jose Veiga avait entretenu une étroite relation avec la banque. Il avait été un bon déposant. Puis, Carregosa a aidé l’entrepreneur à construire la BAIC Bénin (la Banque africaine pour l’Industrie et du Commerce). Banco Carregosa a été empêchée par la Banque du Portugal de participer à la structure de l’actionnariat de BAIC et de la Banque Internationale Africaine (BIA) en projet au Cap-Vert. Cela n’a pas empêché Pedro Malheiro Duarte, président du Comité exécutif de Banco Carregosa, de continuer à aider Veiga à faire avancer le projet BIA au Cap-Vert et à être son représentant permanent auprès de la BAIC.
Le plus important, dans la constitution de cette chaîne bancaire, a été l’acquisition par Jose Veiga de 5% du capital de Banco Carregosa en 2014 par Norwich Group Canada ; la même coquille vide qui n’attira pas l’attention des régulateurs portugais.
Ces quatre étapes achevées, le blanchiment quasiment industriel des fonds de José Veiga, de Denis Sassou Nguesso, de Denis Christel Sassou Nguesso et d’autres prédateurs de la République du Congo, pouvait prendre sa vitesse de croisière.
Les autorités portugaises ainsi que celles du Cap-Vert soupçonnent d’ailleurs la constitution d’un réseau de blanchiment à grande échelle. A ce titre ou pas, l’enquête au Portugal a révélé une proximité avec United Bank for Africa, une banque du Nigeria, avec des succursales dans plus de 20 pays.
Le Président Patrice Talon, nouvellement élu au Bénin, sera-t-il le premier pays d’Afrique francophone à envoyer un signal fort à la criminalité financière ? Rejoindra-t-il le Cap-Vert dans l’ouverture d’une enquête sur ces personnages sulfureux, José Veiga, Philippe Amwame et Yaya Moussa qui ont ouvert un établissement bancaire trouble avec des fonds d’origine incertaine et une activité pour le moins suspecte ?
Il est fort à craindre qu’il ne s’aplatisse face au chantage d’un Denis Sassou Nguesso déchainé qui menacera d’expulser ses compatriotes béninois qui résident au Congo.
Sassou Nguesso, ce maître-chanteur professionnel qui tient beaucoup trop de monde par les bijoux de famille, pour les avoir corrompus, ne sortira pas éternellement vainqueur de ce rapport de force. Les procureurs malfaisants et mafieux, comme les Oko Ngakala, seront remplacés bientôt par des hommes comme Oscar Tavares du Cap-Vert…
Vivement le retour de l’Etat de Droit du Congo en lieu et place de la République Bananière des Nguesso !
Par Rigobert OSSEBI
Source www.congo-liberty.com
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