Par : Robert Gaillard
Deux généraux pour un complot: Qui a «trahi» le Général Dabira ?
La nouvelle est tombée comme une boule de neige sur les réseaux sociaux. C’est la diaspora congolaise qui l’a annoncé via Facebook, WhatsApp, Twetter etc. Puis elle s’est répondue comme une trainée de poudre dans le pays. Les téléphones portables ont sonné pour connaitre la vérité de cette information qui s’apparente à la destruction du haut commandement. «Le général Norbert Dabira et Nianga Mbouala interpellés à la DGST. » La nouvelle a produit un effet boomerang dans la société. « Encore des Généraux interpellés » se sont exclamés deux jeunes à l’arrêt de bus au CCF. « Qu’’ont-ils fait ? » s’est interrogé un homme de passage, jetant un coup d’œil sur le portable du plus jeune en pleine lecture de la nouvelle. En tout cas, comme si c’était la nouvelle de l’arrivée de Jésus, tous les congolais ou presque possédant un téléphone portable avec les options des réseaux sociaux ont tout lu ou presque. Les commentateurs les plus huppés sont allés jusqu’à annoncer « l’arrestation du général Norbert Dabira pour complot présumé contre l’Etat en complicité avec le patron de la garde présidentielle, le Général Nianga Mbouala. » alors que les deux généraux sont piliers actifs du pouvoir de Brazzaville. Cette information a produit plusieurs réactions tant de bouche à oreille que sur les réseaux sociaux, Mais le vrai motif n’a pas été révélé aussitôt, chacun allant dans le sens de son imagination. Pour les journalistes, les portes de sources d’informations étant fermées, même celles de la chaine de télé et radio du Général Norbert Dabira se sont réservés de donner la quintessence de cette nouvelle. Pendant ce temps sur les réseaux sociaux, le site Libre Afrique indique que « le Général Norbert Dabira s’entretenait au téléphone avec le patron de la garde républicain (GR), le Général Nianga Mbouala. Les deux hommes auraient épilogué sur la crise multidimensionnelle que traverse le Congo et sur bien d’autres sujets concernant la gestion du pouvoir de Brazzaville. La causerie interceptée par les services de police congolaise est le motif de l’interpellation des deux généraux congolais à la Direction générale de la surveillance du territoire » Selon le site SOCER, « les deux hommes critiquaient la dérive autocratique du pouvoir face au mécontentement social lié à la crise économique et estimaient que cela ne pouvait durer » Des propos qui n’honorent pas leurs galons et qui prêteraient à un coup d’Etat. Cette conversation épluchée par les services de renseignements habiletés d’écoutes téléphoniques serait mal digérée par les autorités sécuritaires qui illico ont adressé une interpellation aux deux Généraux afin de s’expliquer sur les intentions de cette conversation à la Direction Générale de la Surveillance du Territoire (DGST). Par le même canal, le monde a appris au conditionnel que « Le Général Dabira se serait plié à l’interpellation dès les premières heures. Il aurait même été entendu toute la journée et rentré tard dans la nuit à la maison. Quant au Général Nianga Mbouala qui parait comme son complice, ce dernier aurait repoussé l’interpellation en demandant, selon les dires, aux enquêteurs de l’entendre chez lui à domicile. » Mais depuis, plus aucune information au sujet du Général patron de la garde Républicaine ne filtre. Les qui inondent la toile, font état des fonctionnaires de la DGST qui gardent longtemps les interpellés dans leur service dans le but de les faire accepter les faits dont ils sont présumés accusés. Et, le site Carton rouge d’indique que « à la DGST on y sort pas facilement. Plusieurs personnes y ont passé des mois voire des années pour avoir simplement émis des idées contraires à la volonté du pouvoir alors que le pays prône la liberté d’opinions. Le Général Nianga-Mbouala pourrait tirer la genèse de son refus sur ce cas de figure » a-t-il écrit avant d’ajouter «…Norbert Dabira y va tous les matins jusqu’au soir pour confirmer sa bonne foi de coopérer avec la DGST parce que les propos de cet entretien ne constituent pas un plan concerté de déstabilisation des institutions… » Le même site s’interroge : «…En quoi, parler au téléphone d’une crise multidimensionnelle palpable et de la mauvaise gestion du pays peuvent-elles constituer des délits punis par la loi ?»… Toutefois, il sied de signaler que l’interpellation de ces deux généraux fait encore grand bruit dans la société congolaise au regard du rôle de chacun au sein du pouvoir de Brazzaville. Norbert Dabira inspecteur général des Armées, Nianga-Mbouala patron de la garde républicaine, les commentateurs relèvent un grand étonnement de voir les gestionnaires d’un même pouvoir se canarder alors qu’un adage dit « les chacals ne se bouffent pas entre eux ». Ce n’est pas la première fois que le général Nianga Mbouala est cité dans ce genre d’interpellation. A l’arrestation en juin dernier d’Élie Okandzé son directeur de cabinet suite à une affaire proche de celle du Pasteur N’toumi, le général était interpellé pour s’expliquer. La suite sur cette interpellation n’a pas d’échos… Selon le site Dac-E-News «…Les deux officiers (Dabira et Nianga Mbouala) critiquaient la dérive autocratique du pouvoir, ils dénonçaient la tournure violente prise par le pouvoir pour contenir les mécontentements sociaux dus à la crise économique. De ces conversations, les services des renseignements congolais ont conclu à une tentative de prise de pouvoir par la force, car les deux hommes estimaient que la situation ne pouvait perdurer ainsi. Avant de se rendre à la DGST, Norbert Dabira a été reçu par le ministre de l’intérieur Raymond Zéphyrin Mboulou, qui lui a signifié en personne cette convocation. Le ministre de l’intérieur a pris le soin d’informer Norbert Dabira de ce qui lui était reproché. Il lui a fait écouter ses conversations avec Nianga Mbouala, et l’interprétation qu’en ont faite les services secrets. Norbert Dabira a reconnu l’authenticité des captations de ses conversations devant Raymond Mboulou… ». Des informations à prendre avec des pincettes d’autant plus que les réseaux donnent parfois des informations peu crédibles bien que celle-ci n’ait pas été démentie.
Ce qui est vrai, les congolais se rappellent que le Général Jean Marie Michel Mokoko (pilier du pouvoir de Brazzaville passé à l’opposition) fut d’abord interpellé par la DGST suite à une vidéo mise sur les réseaux sociaux dans laquelle il s’était retrouvé avant d’être poursuivie pour « atteinte à la sûreté de l’Etat ». Une vidéo datant de plusieurs années qu’il aurait même reconnue. L’affaire est revenue à la surface après l’élection présidentielle et le Général Jean Marie Michel Mokoko est écroué à la maison d’arrêt pour atteinte à la sûreté de l’Etat. Aujourd’hui, c’est un autre Général qui est interpellé par le même service pour une conversation susceptible d’un complot visant «la déstabilisation» les institutions de la République. Cette interpellation va t-elle produire les mêmes effets ? Attendons de voir.