PHOTO DE DOSSIER: L’ancien directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, assiste à une réunion du Comité de Bretton Woods au siège du FMI à Washington, le 19 avril 2017. REUTERS / Yuri Gripas / File Photo
Par : Joe Bavier, Karin Strohecker
JOHANNESBURG / LONDON (Reuters) – Les conseillers du gouvernement congolais l’ont prévenue qu’il existe un «risque majeur» pour le Fonds monétaire international (FMI) de rejeter sa demande de sauvetage, réclamée depuis longtemps, selon une lettre de Reuters.
Les négociations relatives à un programme du FMI se poursuivent depuis 2017, le conseil d’administration du FMI ayant demandé au producteur de pétrole d’Afrique centrale d’assurer la soutenabilité de sa dette, qui est essentiellement due à la Chine et aux négociants en pétrole.
À la fin de sa dernière mission au Congo ce mois-ci, une équipe du FMI s’est déclarée prête à soutenir une facilité de crédit d’une durée de trois ans. Mais tout programme devra d’abord être approuvé par le conseil d’administration du Fonds.
« Les conseillers de la république souhaitent vous faire prendre conscience du risque majeur que le conseil du FMI refuse le programme », indique la lettre adressée au Premier ministre congolais, Clément Mouamba, datée du 15 mai.
Le Congo a engagé les conseillers financiers français Lazard et plus récemment Parnasse, une entreprise employant l’ancien Directeur général du FMI, Dominique Stauss-Kahn, pour l’assister dans les négociations avec le Fonds.
La lettre a été signée par Strauss-Kahn et Matthieu Pigasse, responsable de Lazard France. Une source proche de l’affaire a confirmé son authenticité.
Lazard a refusé de commenter la lettre. Les tentatives faites pour joindre Strauss-Kahn ont été infructueuses. Le porte-parole du gouvernement congolais et un responsable du bureau du Premier ministre à Brazzaville n’ont pas répondu aux demandes de commentaires.
Un porte-parole du FMI a rejeté la position des conseillers selon laquelle le programme, qui déboucherait également sur un financement de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement, était mis en doute.
«Ces informations ne représentent pas les vues du FMI. L’équipe du FMI poursuit ses discussions avec les autorités sur les prochaines étapes nécessaires pour pouvoir présenter cet accord au Conseil d’administration du FMI pour discussion. «
VRAIE RESTRUCTURATION?
L’économie congolaise a souffert de la forte baisse des prix du pétrole en 2014, faisant grimper la dette à 118% du PIB en 2017.
Pendant plus d’un an, les efforts de restructuration de la dette avec la Chine – principal créancier bilatéral du Congo – et les négociants en pétrole, notamment Glencore et Trafigura, n’ont guère avancé.
Toutefois, le mois dernier, le Congo a conclu un accord en vue de restructurer une partie de sa dette avec la Chine. Et l’agence de presse Bloomberg a annoncé qu’elle avait également conclu un accord sur sa dette envers Trafigura.
La lettre précise que l’équipe technique du FMI s’est déclarée préoccupée par les efforts réels déployés par les Chinois dans le cadre de l’accord.
«Pour l’équipe technique, il s’agit de prouver aux membres du conseil d’administration que la Chine a accepté une véritable restructuration de ses prêts et pas simplement une reconfiguration technique», at-il déclaré.
Le sénat du Congo a ratifié l’accord avec la Banque d’import-export de Chine lundi.
Selon le ministère des Finances, la dette du Congo vis-à-vis de la Chine s’élevait à près de 1,48 billion de francs CFA (2 milliards de livres sterling) à la fin du mois de mars.
Aux termes de l’accord, le remboursement de 944 milliards de francs CFA dus pour huit projets d’infrastructure sera prolongé de 15 ans. Le Congo doit toutefois rembourser un tiers de ce montant d’ici à la fin de 2021.
Lazard et Parnasse ont également critiqué l’accord avec Trafigura, précisant qu’il ne respectait pas les conditions énoncées par le FMI.
« La formalisation d’un tel accord dans les prochaines semaines enverrait un mauvais signe (…) aux membres du conseil d’administration concernant la réelle volonté du Congo de s’en tenir à son engagement de rétablir la soutenabilité de la dette publique », ont écrit les conseillers.
Des groupes anti-corruption ont longtemps critiqué l’opacité du secteur pétrolier congolais et des accords de prêt conclus avec des négociants en pétrole et ont appelé le FMI à utiliser sa position pour promouvoir la transparence.
« Le Congo doit divulguer publiquement l’existence et les conditions de tous ses prêts adossés à du pétrole avant que le FMI ne prévoie plus de soutien financier », a déclaré Natasha White, chercheuse en pétrole pour le groupe de campagne Global Witness.
( Texte traduit par DAC PRESSE )
Lire l’original ici :
https://uk.reuters.com/article/uk-congorepublic-imf-exclusive/exclusive-congo-republics-imf-bailout-at-risk-over-debt-deals-document-idUKKCN1SS1S6?fbclid=IwAR0L4Wz3KysyuaKmX2Fn6Nufa5zuTfvxjjBE9MOzcYhekCqxplqXbSDGRW8
Joe Bavier, Karin Strohecker
Reportage complémentaire par Inti Landauro à Paris; Édité par Mark Heinrich Nos normes: Les principes de Thomson Reuters Trust.