Notre pays le Congo se trouve à la croisée des chemins depuis le 22 Septembre 2015. Ce jour là, le président de la République Denis Sassou Nguesso et son parti le PCT avaient décidé en toute illégalité de changer la constitution du 20 Janvier 2002, afin de pérenniser le système clientéliste au pouvoir depuis 32 ans.
Les faits sont têtus, quels que soient nos souhaits et nos vœux. En optant pour le passage en force et en réprimant dans le sang l’expression populaire, le président de la République a raté la seule et unique occasion de sortir par la grande porte, alors que nombreux citoyens ont cru, naïvement peut-être, qu’il pouvait choisir la voie de la raison et de la sagesse, celle qui consistait à mettre en place les conditions d’une alternance démocratique et apaisée en 2016.
La crise qui sévit actuellement au Congo est donc la conséquence de ce simulacre de référendum, un véritable coup d’Etat anticonstitutionnel, voulu et soutenu par les tenants du pouvoir. Cette nouvelle mouture constitutionnelle qui n’est pas l’expression du peuple congolais (moins de 10% de votants) a été promulguée le 06 novembre 2015, au mépris de toute règle de droit. Elle a donc force exécutoire, la promulgation étant l’acte par lequel l’impérium lui est accordée, en vertu de l’article 246 de ladite constitution (la présente loi entre en vigueur dès sa promulgation exécutée comme constitution du Congo). Or, force est de constater que le pouvoir de Brazzaville qui s’est battu corps et âmes pour nous imposer une constitution montée de toutes pièces, n’est plus pressé de l’appliquer, ou plutôt, ne peut l’appliquer. Comment peut-on avoir une même Assemblée Nationale et un même Sénat alors qu’on est censé passer d’une République à une autre ? Comment peut-on avoir le même président alors que nous sommes censés passer d’une république à une autre sans qu’il y’ait une élection au préalable ? Toutes ces questions qui demeurent sans réponses, montrent à quel point le président de la République est entrain de conduire le pays sur le bas coté de la paix et de la stabilité et l’expose à de soubresauts et déchirements qui peuvent être irréversibles. La nouvelle constitution prévoit un Premier ministre, chef du gouvernement et responsable devant les députés qui par une motion de censure peuvent renverser le gouvernement. Or, ces mêmes députés sont régis par des dispositions contenues dans la constitution du 20 janvier 2002 et leur mandat court jusqu’à la mise en place de la prochaine assemblée. La nouvelle constitution dans son article 138 stipule que le Président de la République peut dissoudre l’Assemblée Nationale alors que celle-ci est régie par la Constitution du 20 Janvier 2002 qui stipule dans son article 114 que le président de la république ne peut dissoudre l’Assemblée Nationale et que l’Assemblée Nationale ne peut démettre le président de la république. Sur le plan constitutionnel, le président de la République qui tire sa légitimité de la Constitution du 20 janvier 2002, sur laquelle il a prêté serment en 2002 et en 2009, ne peut nommer un Premier ministre, chef du gouvernement comme prévu dans la Constitution qu’il a promulgué, sauf à vouloir, une fois de plus, passer outre les textes qui régissent le Congo comme il en a l’habitude. Aujourd’hui, personne ne sait avec exactitude la Constitution qui régit notre pays. Le Congo de 2015 sous le règne de Sassou Nguesso, pourtant pourvu des juristes de bonne qualité, est un no man’s land juridique; nous sommes donc devenus des SDF constitutionnels. Placide Moudoudou adepte du « nzobi constitutionnel » et Michel Innocent Peya « chantre de la théorie de la termitière » qui fait le tour du monde aux frais de la République pour expliquer qu’il fallait changer notre Constitution, sont incapables de nous dire ce qu’il convient de faire pour sortir de cet imbroglio juridique qu’ils ont créé et qui ramène le pays 50 années en arrière. Dans notre pays, les hommes politiques médiocres et les juristes peu vertueux ont passé leur temps à nous parler de la démocratie à l’africaine, comme si la tolérance et l’alternance démocratique étaient l’apanage des occidentaux, et donc par voie de conséquence, incompatibles avec les valeurs africaines. Au contraire, tout récemment en Tanzanie, John Magufuli a été élu avec plus de 53% après que le président Jakaya kikwete ait facilité une alternance démocratique et apaisée en quittant le pouvoir après deux mandats passés à la tête de l’Etat. Un peu partout sur le continent africain, des Etats comme le Nigeria, le Ghana ou même le Bénin organisent des élections libres et transparentes, seules garanties d’une alternance apaisée. Malheureusement, chez nous, des renégats nous parlent de la démocratie à l’africaine où les forces occultes et autres pratiques ésotériques basées sur des croyances irrationnelles feraient force de loi. Ils prétendent que les institutions ne fonctionnent pas parce que les chefs traditionnels, les sages et autres danseurs du ventre qui vivent au crochet des politiques au pouvoir ne sont pas membres du Parlement. Une véritable démocratie de parjure qui reflète un manque d’état d’esprit démocratique. Seule compte à leurs yeux, la conservation du pouvoir par tous les moyens et à n’importe quel prix. Cette Constitution dont la campagne référendaire a coûté des milliards à notre trésor public est déjà violée par ses géniteurs et ses fervents défenseurs. En effet, son article 63 dispose que : « L’opposition congolaise est reconnue en république du Congo. Elle ne peut subir des limites quant a son existence et à ses activités démocratiques, que celles imposées a tous les partis politiques par la présente constitution et la loi ». Qui pourrait affirmer, au regard des récents évènements, que l’opposition est respectée et reconnue par le pouvoir dictatorial du PCT ? Mettre aux arrêts, sans aucune forme de procès, les militants de l’opposition, est-ce cela reconnaitre l’opposition ? Incarcérer des personnalités politiques comme Paulin MAKAYA président de l’UPC et Alain Ngoya Kessy secrétaire général du CADD, c’est reconnaitre l’opposition ? L’opposition a-t-elle le droit de tenir des réunions dans des salles publiques ? A-t-elle un temps d’antenne sur les chaines publiques et privées du pays ? Les leaders de l’opposition ont-ils le droit de circuler librement dans notre pays ? Notre pays marche à reculons comme l’avait si bien dit le défunt Mgr Ernest NKOMBO lors de l’oraison funèbre consécutive au décès de Mgr Barthelemy BATANTOU car pendant le monopartisme, il y avait un semblant de débat, même au sein du PCT. Le Président Sassou NGUESSO doit sauver ce qui reste à sauver c’est-à-dire l’unité nationale et la paix. Il y a un temps pour tout dans la vie et nul n’est indispensable dans ce monde. Le Congo est un patrimoine commun et ne devrait pas être confisqué par qui que ce soit. Il est encore temps pour le chef de l’Etat de prendre de la hauteur en privilégiant l’intérêt général de la Nation qui s’articule autour du vivre ensemble, de la promotion de la démocratie et du respect des textes qui régissent notre pays, textes sur lesquels il avait prêté serment. Un chef de l’Etat ne doit pas être un problème pour ses concitoyens mais une solution. La paix ne doit pas être forcée par les armes et les intimidations ou les arrestations arbitraires. Alors, disons tout simplement que le vote du 25 Octobre 2015 était un non événement et n’a servi à rien et la vraie fausse constitution promulguée le 06 Novembre 2015 est en réalité mort-née. Fait à paris le 20 Décembre 2015
Henri Blaise NZONZA
Président de l’Association des « Amis de Parfait KOLELAS » (APAKO)