Le délai, dont disposait le pays pour payer les intérêts sur son emprunt obligataire en dollars vient de prendre fin
Chaque heure qui passe rapproche un peu plus le Congo du défaut de paiement. En fin de semaine, Moody’s a emboîté le pas à Standard & Poor’s et abaissé la note du pays, de B3 à Caa2, tout en maintenant sa perspective négative. L’agence estime que « la République du Congo fera défaut prochainement sur son Eurobond [emprunt obligataire placé auprès d’investisseurs internationaux] et pourrait rester en défaut pour une période prolongée ».
« Période de grâce »
La « période de grâce » de trente jours, dont disposait Brazzaville pour payer les intérêts sur ses obligations en dollars vient de prendre fin. Pour mémoire, le 30 juin, le pays n’avait pu honorer le paiement d’un coupon de 21 millions de dollars sur son unique emprunt obligataire international.
Les fonds ont pourtant été transférés par Brazzavile le 26 juin à son « trustee », l’entité basée à New York et chargée de représenter le pays auprès des investisseurs. Mais ce dernier a dû geler le paiement aux porteurs de dette après avoir reçu deux injonctions judiciaires émises à la demande de la société de travaux publics Commisimpex (Commissions Import Export). Celle-ci réclame le paiement de factures impayées pour des travaux remontant aux années 1980. Et les sommes en jeu sont colossales pour le Congo. La bataille judiciaire, engagée depuis des années face aux tribunaux en France, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, a en effet débouché sur deux décisions de justice (en 2013 et 2015) qui évaluent à près de 1 milliard de dollars la dette du pays à l’égard de Commisimpex. Soit environ 13 % du PIB du Congo, selon Moody’s.
S’il reste relativement rare, le blocage des paiements aux porteurs obligataires par un seul créancier (ou un groupe de créanciers) n’est pas inédit. Ce fut le cas du Pérou en 2000, du Nicaragua en 2003 et surtout de l’Argentine en 2014.
Le seul espoir pour les investisseurs est une issue judiciaire favorable. « Les injonctions ont été contestées par le trustee et nous attendons l’issue de la procédure », explique un spécialiste des marchés émergents. En 2017, l’emprunt obligataire en dollar de la République du Congo a réalisé la deuxième meilleure performance (+28 % au 10 juillet) des marchés dits « frontières ». Ce rendement élevé est la contrepartie de risques tout aussi élevés : c’est déjà la troisième fois sur les quatre dernières échéances que le paiement du coupon pose problème.
SOPHIE ROLLAND
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