COUP DE CŒUR
» le danger pour l’écrivain noir est de s’enfermer dans sa « noirceur », comme dirait Frantz Fanon. Il ne s’agit pas de tomber dans le piège de l’affrontement basique entre la civilisation noire et blanche. L’autocritique est essentielle si l’on veut ensuite poser un regard juste sur le reste du monde « . ALAIN MABANCKOU
Ce poète et essayiste originaire de la région côtière de Pointe-Noire au Congo-Brazzaville nous régale à travers les récits exaltants qui font revivre les mœurs et coutumes de ce pays d’Afrique centrale. Dès son plus jeune âge, ses talents de conteur captivaient l’assistance qui s’empressait autour de lui après un match de football entre V. club MOKANDA et AS CHEMINOT. C’est à 22 ans, après son cycle universitaire de lettre-philosophie et le droit à l’université Marien Ngouabi, il s’envola pour poursuivre ses études en France, que sa passion d’écrivain prit le dessus sur celle de conteur.
En 1998, le monde littéraire découvrit le nouveau lauréat du grand prix littéraire de l’Afrique noire avec son premier roman intitulé « bleu, blanc, Rouge ». Ce fut le début d’une série de consécration. En effet, en 2005 son roman « Verre cassé » fut repris et interprété au théâtre. L’année suivante, il remporta le prix Renaudot avec « Mémoire de porc-épic ». Ce dernier roman qui nous a séduit par son côté envoutant, captivant et surtout ensorcelant. C’est avec plaisir et curiosité que nous nous sommes laissés emporter par le récit du personnage principal et intrigant, le porc-épic. Comment ne pas reconnaître ses traditions qui nous habitent à travers les péripéties que traverse ce personnage unit par le mal avec son maître KIBANDI ? C’est le Congo qui est dépeint dans toute sa profondeur traditionnelle ou le bien côtoie sans cesse le mal.
Lorsqu’il raconte les années du monopartisme au Congo-Brazzaville, l’on s’attend à une accusation profonde d’un pouvoir dictatorial, mais non, Alain nous régale, en usant des différents dialectes du Congo, dans la transcription presque parfaite de la vie quotidienne des congolais. Tout y passe, tournée de façon agréable et drôle. De l’accoutrement congolais, de la mode en solex, vespa et de la fameuse Peugeot 504 des membres du Comité central. » Demain j’aurai vingt ans » nous plonge actuellement dans notre culture des années 70 relatée avec talent et brio.
Alain MABANCKOU partage ses mots et ses maux avec le monde entier ou l’humain est parfois incorrigible mais reste une source intarissable d’expérience à exploiter. Il trace un regard neuf sur le XXIe siècle ou la philosophie du cœur sur la main est plus que jamais présente dans tous ses récits. C’est cette démarche humaniste qu’il véhicule dans ses récits qui lui vaut d’être nommé Chevalier de la Légion d’honneur. Défenseur de la littérature francophone qu’il enseigne aux USA (Californie) et ses œuvres traduites en plus d’une quinzaine de langues prouvent ainsi que » le noir est une couleur belle et indispensable « . (1)
Jean-claude BERI, www.dac-presse.com
—————————————————————————————Alain MABANCKOU est né le 24 février 1966″ Bleu, blanc, Rouge » Alain MABANCKOU éd., Présence africaine 1998. » Verre cassé » : Alain MABANCKOU, éd. Seuil 2005 » Mémoires de porc-épic » : Alain MABANCKOU, éd. Seuil 2006 228 p » Demain j’aurai vingt ans » : Alain MABANCKOU éd. Gallimard (2010) 384 p
(1) » Black Bazar » : Alain MABANCKOU, éd. Points 2009 (Seuil) 265 p